Leon Roufosse© 2009 • Privacy Policy • Terms of Use
EN 3 JOURS, LA CHINE EXTERMINE SES MOINEAUX
Le 18 avril 1958 à cinq heures du matin, l'horrible chasse aux moineaux commençait pour se terminer le 21 avril. Pendant ces 72 heures, le pays entier était engagé dans une hallucinante chasse aux moineaux.
Le soir du 21 avril, le gouvernement exprimait sa satisfaction : un des 4 fléaux de la Chine, déclarait-il, avait été exterminé par le peuple.
Les 4 fléaux de la Chine
On voyait un peu partout des affiches les représentants et invitant impérieusement la population à les détruire
- Le rat propagateur de la peste
- Le moustique vecteur du paludisme
- La mouche responsable de très nombreuses maladies
- Et le moineau….
Le plus horrible des 4 fléaux disaient les affiches, la presse et les propagandistes.
Affiche propagande posée sur les murs de Pékin
Le rat, le moustique, la mouche et les moineaux sont
les 4 fléaux de la Chine. Camarades, unissez-vous
pour les détruire
Et pour étayer, suivait le calcul suivant :
1 moineau mange chaque année 2,500 kilos de graines. Il y a à Pekin 1 million de moineaux qui absorbent 2500 tonnes de semences pillées dans les récoltes.
Il y a en Chine presque 10 millions de moineaux qui consomment 25000 tonnes de graines.
Dans un pays où il y a tant de bouches à nourrir, où leur nombre augmente avec une prodigieuse rapidité, les moineaux sont le plus terrible des 4 fléaux qu'il faut radicalement détruire.
Mais quel mode opératoire utiliser pour les exterminer ? Le fusil ? C'est insuffisant et dangereux et la poudre, bien qu'elle ait été inventée en Chine est chère. Et puis, tiré plus de 10 millions de coups de fusils, impensable !
Un zoologiste soviétique fit alors savoir qu'il avait découvert que les moineaux étaient incapable de voler plus de 2H30 sans tomber épuisés. Les autorités chinoises décidèrent d'utiliser cette découverte pour détruire les 10 millions de moineaux pillards de graines.
Une immense campagne de propagande fut entreprise et toute la population fut mobilisée pour cette chasse.
Hommes, femmes, enfants, vieillards, nul ne pouvait s'y soustraire sous peine de poursuites.
Une mobilisation générale
Les habitants d'un village promènent triomphalement les milliers de dépouilles de moineaux qu'ils ont tués. L'orgueil du devoir accompli les empêche de sentir l'odeur dégagée par les petits cadavres
Le jour J, le 18 avril et à l'heure H, 5 heure du matin, l'extermination commençait.
Obéissant aux consignes, les responsables d'immeubles, de rues, de quartiers étaient dans les rues. Des millions d'hommes, de femmes, d'enfants, vieillards tapaient sur des vieilles casseroles, des chaudrons, des gongs, lançaient des pétards, agitant des bâtons auxquels étaient accrochés des chiffons ou des vieux linges.
Les plus agiles étaient grimpés sur les toits et dans les arbres. Les autres parcouraient les rues, les places, les terrains vagues, les jardins, les champs et même les bois et les Chinois, sur ce plan, ont des ressources. Il fallait par tous les moyens empêcher les moineaux de se poser.
Dans les écoles, les instituteurs avaient distribué des lance-pierres et ils les canardaient dès qu'ils s'arrêtaient sur le rebord d'un toit, d'une fenêtre ou d'un banc.
Au bout de 48 heures de bruit et d'agitation, les moineaux épuisés commencèrent à tomber en masse. Dès qu'ils touchaient le sol, femmes, hommes et enfants se précipitaient sur eux en les insultant et les achevaient à coups de bâtons, en les piétinant. Mais le bruit et les mouvements ne cessaient pas. Il ne devait pas cesser tant qu'un moineau serait toujours en vie, c'était la consigne.
Cela dura ainsi 72 heures. Pendant 3 jours, aucun habitant de Chine ne dormit, ni les enfants, ni les malades, ni les femmes. Si les moineaux tombaient d'épuisement, grands nombres de leur chasseur étaient sur le point de faire de même. Quelques uns tombèrent des arbres et des toits, il y eu des jambes cassées et même quelques décès, mais le zèle, soutenu par les brigades d'activistes qui félicitaient et encourageaient, ne fléchit que sous l'épuisement.
Après plus de 72 heures d'une infernale chasse, très fier de son peuple, le régime fit un communiqué annonçant que le fléau moineau avait disparu du ciel chinois et que les récoltes allaient être dorénavant abondantes.
Conclusion
Une telle chasse n'est évidemment concevable que sous un régime autoritaire et malsain. Très vite, les Chinois s'aperçurent que l'accroissement des récoltes n'étaient pas au rendez-vous comme l'avait promis les dirigeants et que les moineaux n'étaient pas un fléau bien au contraire, ils avaient un rôle utile en détruisant les insectes nuisibles aux cultures et que les exterminer en masse avait été une grave erreur et un crime stupide.
Les insectes n'ayant plus d'exterminateur se multiplièrent à la vitesse grand V. ils causèrent tellement de dommage aux cultures que la Chine fut dans l'obligation d'importer de grandes quantités de céréales.
Le très haut fonctionnaire qui avait ordonné la grande chasse d'avril 1958 fut destitué de ses fonctions.
Finalement, la Chine a réimporté quelques milliers de moineaux, qui se sont rapidement remultipliés et égayent jardins et parcs où touristes et Chinois pratiquent le Tai-chi sous les gazouillement des sympathiques volatiles.
En 1958, il était mal aisé, voir impossible de connaître ce qui se déroulait en Chine. Un des rares journalistes occidentales, Fernand Moulier, se trouvait en Chine le 18 avril 1958 et il a fait un récit circonstancié de cet odieux crime.
Dans les écoles, les instituteurs avaient distribué des lance-pierres
A méditer
En Europe, nous ne tuons pas les moineaux en les chassant, les produits chimiques pulvérisés chaque année sur les cultures s'en charge !
Christiane ROUFOSSE